[Facil] Le droit à l'accès

Stéphane Couture steph at koumbit.org
Ven 22 Déc 14:06:57 EST 2006


Bonjour Yannick,

   tes réflexions son très intéressantes; et pourraient presqu'être 
reprises dans leur totalité dans un article pour le Bulletin Facil.

   Je poursuivrai cependant ces discussions à partir du 2 janvier; 
j'espère que vous passerez tous et toutes un heureux temps des fêtes.

Stéphane

Yannick Delbecque a écrit :
> Sans citer de passages spécifiques de la discussion récente entre
> Stéphane et Robin, j'ai décidé de donner mon point de vue sur la
> question du drot à l'accès. 
>
> Je tiens à préciser que j'ai assisté comme représentant de FACIL en
> remplacement de Robin à une des premières rencontres de discussion au
> sujet de la création de Maillons - qui semble (J'ai malheureusement peu
> d'information sur le sujet) justement proposer une 
> initiative pour favoriser l'accès à Internet. Mon impression est que
> le groupe, qui, si j'ai bien compris son histoire, devait initialement
> être un moyen pour plusieurs groupes ayant des préoccupations
> "similaires" de partager des ressources et de faire des demandes de
> subventions communes. En cherchant à préciser ce que ces groupes 
> partagent, le projet s'est transformé peu à peu pour devenir
> associé à l'"accès à un internet citoyen". Ce n'est pas si loin d'un
> dénominateur commun acceptable. Je crois cependant l'idée plus générale
> de "droit à la communication") préférable, mais de toute manière, il me
> semble que de  réduire la question de l'accès à Internet comme moyen de
> communication _citoyen_ à une question de connextion haute-vitesse 
> pourrait s'avérer être une erreur. 
>
> Pour illustrer, pensons à la mise en place d'un programme du type "branchons les
> familles" tel que le gouvernement l'a fait il y a quelques années. Ce
> programme n'a pas permis de vraiment progresser au sujet du droit à la
> communication - ou de l'accès à un internet _citoyen_. Il est certain 
> que de donner à plus de gens un accès à haute vitesse permettrait à un
> plus grand nombre de communiquer via le médium internet. Cependant,
> de multiples entraves au droit à la communication subsiste. Je crois que
> le danger dans un tel programme est de faire adopter des habitues à de
> nouveaux "internautes rapides" sans mettre en place ce qu'il faut pour
> que l'internet soit "citoyen". 
>
> Par exemple, si l'utilisation des DRM s'impose, légalement ou par acceptation
> passive de la majorité (imaginez d'ici quelques années une majorité d'utilisateurs de Vista
> et de son "trusted computing"), l'effet de la généralisation l'accès haute
> vitesse sera principalement de permettre à un plus grand nombre de gens d'utiliser un moyen de communication
> extrèmement contrôlé, ce qui est, je crois, l'antithèse du droit à la communication. 
> Le programme n'aura eu pour effet que de permettre la fidélisation
> d'un plus grand nombre de clients et l'adoption implicite de la
> règlementation virtuelle - via les DRM - créé par l'industrie, et ce avec
> l'aide des fonds publics. De même, si la neutralité d'Internet
> viens à disparaitre, l'accès plus facile à internet n'aura rien
> d'un droit égal à la communication, et l'internet citoyen sera beaucoup
> plus difficile à mettre en place. 
>
> De tels programmes peuvent être vus comme des subventions à l'industrie des
> télécomunications, et une manière de les rendres plus acceptables serait
> de demander certaines garanties en échange: par exeple en ce qui à
> trait aux méchanismes de fermeture de comptes (pensez au cas de Telus qui, en Ontario,
> a fermé abusivement le site du syndicat d'une partie de ses employés lors d'un conflit de
> travail...), voire même des garanties de services (espace minimal pour
> créer un site personnel, etc) ou au sujet du respect de la vie privée,
> au sujet des logiciels libres ou du respect de certains format, ou de
> l'organisation des services. Je n'ai pas réfléchis tellement à cette
> question et ces exemples ne sont peut-être pas les meilleurs, mais
> l'idée est que dans un tel programme, il faudrait imposer certaines
> normes minimales pour s'assurer que le résultat soit "citoyen".
>
> Un parallèle: si on veut donner accès à la population d'une ville
> donnée à des moyens de transports à prix modique, le moyen privilégié
> depuis plus d'un siècle est le transport en commun.  Si un jour une ville
> propose un programme d'achat de véhicules, disons des scooters, pour
> les étudiants qui s'intitulerait "Deux roues par étudiants" ou 
> "un moteur par étudiant", ou encore "Rouler les familles" :), pourquoi
> nous indignerions-nous (même en faisant abstraction de la question 
> écologique)? Parce que l'ensemble du programme passerait pour une 
> subvention déguisée à l'industrie automobile qui ne serait pas vraiment
> axée sur le développement communautaire à long terme. La différence entre
> la solution communautaire et la solution... disons "individualiste" est 
> une question de contrôle des ressources. Dans les deux types de programmes,
> l'industrie y trouvera son compte: elle produira des scooters ou des 
> autobus, peut importe si c'est l'état ou les individus qui les commandent.
> Cependant, dans l'approche plus communautaire, la communautée se donne
> un plus grand contrôle sur ce qu'elle créé, elle commande ce dont 
> elle a besoin, elle contrôle le développement de son système de transport,
> alors que dans l'approche individualiste, la communauté à beaucoup moins
> d'influence sur le résultat. 
>
> Le parallèle routier peut d'ailleurs être étendu: si pour avoir accès
> au transport, il faut des véhicules, il faut aussi des routes. La neutralité
> d'internet, c'est très similaire à la neutralité du réseau routier.
> Utilisez le véhicule que vous voulez, organisez du co-voiturage ou
> voyagez en limousine, le réseau est toujours là pour vous. Si une forme
> de ségrégation se mettait en place sur le réseau routier comme on propose
> sérieusement de le faire sur internet présentement, il n'est pas
> difficile d'imaginer les conséquences: difficulté de voyager sur de
> longues distance, difficulté probables à faire du co-voiturage (qui
> ferait basser les revenus des propriétaires routiers...), les routes des
> pauvres seront plus dangeureuses parce que moins bien entretenues (bon,
> c'est déjà un peu le cas...). 
>
>
> Si on veut faire avancer la cause d'un internet citoyen, je crois qu'il
> faut rappeler l'importance de l'acompagnement. Donner accès à internet 
> est un aspect du problème de l'internet citoyen, mais il
> faut travailler à minimiser le clivage dans les savoirs. Même si on
> donne un blog à chaque citoyen demain, il est fort probable que la
> grande majorité d'entre eux restraient inutilisés, en grande partie parce
> que beaucoup de gens qui auraient des choses à dire n'ont pas l'habitude
> ou la confiance nécessaire pour écrire ce qu'ils pensent ou seraient
> intimidé par l'apprentissage d'une nouvelle syntaxe ou de nouveaux
> outils. Si on donne simplement accès à internet, les gens utiliserons
> le courriel pour des communications personnelles, et bien peu de leur
> actions seront "citoyennes" - pas nécessairement par manque de volonté, mais par manque
> de compétences. Trop peu de gens pourraient se créer par eux-même un site personnel
> simple pour s'y exprimer, trop peu de gens serait en mesure de
> contribuer à un wiki communautaire (pour un cartier par exemple), à un
> calendrier d'évènements collectifs, etc. Il faut organiser un
> accompagnement pour ces gens, les aider à s'approprier les technologies
> nécessaires pour les utiliser à leur manières. L'accès haute vitesse est
> bien que pouvant être utile, reste secondaire dans cette perspective. 
>
> Voilà pour l'instant.  
>
> Yannick Delbecque
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